Neuchâtel, son lac, le charme bucolique de ses forêts de sapins et de ses verts pâturages, ses magnifiques bâtisses en calcaire jaune, sa séculaire tradition horlogère, sa célèbre Fête des vendanges, ses loyers abordables, ses activités touristiques variées… Voilà qui devrait donner des idées aux médecins désireux d’ouvrir un cabinet en Suisse romande. Aujourd’hui, c’est la Société neuchâteloise de médecine (SNM), aidée par le délégué à la domiciliation, qui entend promouvoir les multiples avantages de ce beau canton pour tenter d’apporter une réponse à la pénurie de médecins qui y sévit.
Les MPR se verront proposer un parrainage par des membres de l’association des médecins de famille.
S’inspirant de ce qui est déjà fait depuis des années pour les expatriés, la SNM et l’Association médecins de famille et de l’enfance de Neuchâtel ont décidé de collaborer avec le Service cantonal de la santé publique et le délégué cantonal à la domiciliation pour offrir un accompagnement personnalisé aux médecins de premier recours qui souhaitent venir s’installer dans le canton. Ces derniers se verront proposer, dès leur arrivée, un parrainage – ou un marrainage – par des membres de l’Association des médecins de famille. Le préposé à la domiciliation se tiendra à leur disposition pour des questions d’ordre pratique, comme la recherche d’un logement, d’une crèche ou d’une école, les démarches administratives (banque, assurances, fiscalité) ou le soutien du partenaire dans l’élaboration d’un nouveau projet professionnel.
Cette offre ne fera pas double emploi avec les cours à l’installation et les séminaires organisés par la Fédération des médecins suisses (FMH) puisqu’il s’agira plutôt d’un coaching informel. Son lancement se fait dans le prolongement de l’initiative « Neuchâtel, un canton à vivre », présentée en septembre 2022 par le Conseil d’État neuchâtelois. La page destinée aux médecins est disponible à l’adresse www.neuchatel-un-canton-a-vivre.ch/medecins. La collaboration avec le délégué à la domiciliation est l’une des particularités du nouveau projet. Il semble d’ailleurs que Neuchâtel soit le seul canton à disposer d’un tel service. Créé en 2019, ce dernier a pour mission de renforcer l’attractivité résidentielle du Pays de Neuchâtel. Les pendulaires, entres autres, sont directement visés – mais pas, ou plus, seulement. Les services du délégué s’emploient ainsi à démontrer comme il fait bon vivre dans ce canton au paysage varié, avec au Sud la région du Littoral et au Nord un plateau montagneux abritant les villes horlogères de La Chaux-de-Fonds et du Locle, inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Le canton de Neuchâtel n’est pas le seul à faire face à une pénurie de médecins de famille. C’est le pays tout entier qui doit tabler sur l’arrivée de médecins étrangers pour couvrir les besoins de la population. Le modèle de simulation de l’Observatoire national de la santé (Obsan) montre que cette dépendance s’est accentuée au cours des ans dans un bon nombre de spécialités, en particulier la médecine générale, la pédiatrie, la psychiatrie et la psychothérapie ainsi que l’orthopédie.1 L’apport de l’immigration est à présent essentiel. En 2021, une étude menée par la Fédération romande des consommateurs (FRC) dans sept régions, urbaines et rurales, avait montré que, pour obtenir un rendez-vous chez un médecin de famille, il fallait passer jusqu’à 30 appels.
Depuis le 1er janvier 2022, la situation s’est encore aggravée en raison d’une législation introduisant l’obligation d’avoir travaillé pendant trois ans dans un établissement reconnu de formation en Suisse avant de pouvoir obtenir le droit de facturer à l’assurance-maladie de base. Neuchâtel et d’autres cantons romands aimeraient obtenir une dérogation. La question devrait être discutée lors de la session de printemps 2023 au Parlement fédéral. Une acceptation de cette demande d’exception apporterait un peu de répit, sans représenter toutefois une solution à long terme. Il faut savoir que, dans le canton de Neuchâtel, l’arrivée de plusieurs médecins praticiens a permis de combler partiellement la pénurie en médecine de premier recours au cours des dix dernières années.
D’autres mesures susceptibles de produire des effets plus durables ont déjà été prises et devraient se poursuivre. Citons, par exemple, une aide financière proposée par certaines communes pour l’installation des cabinets de groupe, ainsi que le développement du cursus neuchâtelois de médecine de famille. Créé en 2012 et financé par l’État, il vise à encourager la relève indigène par des stages en cabinets privés.
Avec cette nouvelle opération de séduction, Neuchâtel affirme son intention d’offrir des conditions attractives aux médecins, et en particulier aux Genevois qui ne peuvent pas s’installer chez eux en raison des limitations existant dans leur canton. En Suisse romande, Genève fait en effet figure d’exception, avec une densité de médecins par habitant plus forte que la moyenne. C’est donc tout à fait logiquement que les espoirs se tournent vers la ville du bout du lac Léman…